Grèves, manifs, démocratie et… élections

La démocratie est un mot fort, un étendard d’identité nationale, un guide de pensée et d’action. Chacun s’en gargarise : « Nous sommes en démocratie, Môssieu ».

Périclès, repris par Abraham Lincoln, disait : « La démocratie, c’est le gouvernement du peuple par le peuple, et pour le peuple ». Cette maxime figure dans la Constitution française de 1958. Seulement voilà, la démocratie a trois visages :

– la démocratie directe, dans laquelle le peuple adopte lui-même les lois et choisit comment et par qui elles seront appliquées

– la démocratie représentative où la population élit des représentants et leur délègue ses pouvoirs

– la démocratie semi-directe, une variante de la précédente, où, parfois on demande au peuple de prendre telle ou telle décision, par le biais notamment d’un référendum (1)

En France, nous vivons en démocratie représentative. Nous possédons des structures par couches superposées (municipalités, conseils généraux, conseils régionaux, Assemblée Nationale et Sénat) et, en votant, nous mandatons des représentants pour prendre des décisions à notre place.

Alors, quand près de 50 % des Français en moyenne s’abstiennent de voter dans pratiquement n’importe quelle élection, que devient notre démocratie représentative ? Il ne faut pas s’étonner que les gens au pouvoir, quels qu’ils soient, aient envie de transformer une démocratie en oligarchie.

Faire grève, oui – et c’est un droit

Manifester, oui – et c’est un droit

Voter, oui – et c’est un devoir. Hélas, ce n’est pas encore une obligation.

Voilà tout le symbole de notre société actuelle : j’ai des droits, mais j’oublie mes devoirs.

Faisons les choses dans l’ordre, que diable ! A quoi servent les cris de millions de gens dans la rue si, parallèlement, l’urne ne recueille pas leur voix (ironie des mots) ? Donner de la voix dans la rue, oui, mais forts de celle donnée dans l’urne !

Je suis même étonnée que Sarkozy, qui utilise si bien le mépris, le déni, l’hypocrisie, et les invectives, n’ait pas encore dit tout haut ce qu’il pense tout bas : « Ta gueule, peuple qui ne vote pas ». D’autant que notre système refuse de comptabiliser les votes blancs, vraie voie de contestation.

Quand la réforme des retraites sera votée – et appliquée, les manifestants se regarderont dans la glace en se disant sans doute : « On a fait de notre mieux pour stopper ça ; on n’a pas réussi ». Ce serait bien qu’ils ajoutent : « Désormais, je vais voter ».

Mais qu’on ne se méprenne pas : je connais l’autre versant de la situation et je sais que les abstentionnistes sont également des « àquoibonistes ». Car, lorsqu’on analyse les promesses non tenues et qu’on observe le comportement des hommes et femmes politiques, il y a vraiment de quoi être dégoûté de les élire.

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(1) Enfant, j’ai un jour demandé à mon père ce qu’était un référendum. Il m’a répondu : « Imagine qu’on te demande si tu es contente que le Père Noël vienne. Tu répondrais oui. Mais on ajoute que c’est pour t’apporter un martinet (espèce de fouet, pour ceux qui ne savent pas). Et là tu dirais non. Eh bien, un référendum, c’est ça : on s’arrange pour te poser une question embarrassante à laquelle il faut répondre oui, alors qu’en définitive tu as envie de répondre non ».


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