Collaboration

Collaboration
Didier Sandre et Michel Aumont

Autriche, 1932. Le compositeur Richard Strauss et l’écrivain Stephan Sweig travaillent à la réalisation d’un nouvel opéra. Le premier s’accommode du nazisme montant et minimise ses effets, le second est juif, douloureusement conscient des dangers.

Cette « collaboration » est donc double : d’une part deux artistes qui s’admirent, se respectent et s’apprécient ; d’autre part la pression du Reich, qui veut épurer la culture, écarte et réprime les artistes non conformes à ses normes et oblige les autres à collaborer. Le texte, dense et fort, illustre parfaitement la situation. Il est remarquablement mis en valeur par par un équilibre parfait entre décors, costumes, lumières et mise en scène. Le résultat est un spectacle d’une élégance et d’une sobriété remarquables.

Les comédiens sont complètement habités par leur rôle :de l’art et du talent à l’état brut.

Michel Aumont campe un Strauss bravache et plein de faconde, glissant imperceptiblement de la certitude d’être intouchable vers une prise de conscience de la réalité, avec une vérité de ton et d’expression extraordinaire.

Didier Sandre incarne magistralement un Sweig humaniste et fragile, rongé par les ravages que la politique répressive du Reich inflige à l’être qui pense et crée. Sa voix, ses yeux, ses mains, expriment magnifiquement ses idéaux, son pacifisme mis à mal, sa foi en l’homme ébranlée, son immense désarroi.

Christiane Cohendy (Pauline, l’épouse de Strauss) est impressionnante de naturel, notamment lorsqu’elle entre dans une colère légitime empreinte de dignité face à l’officier allemand qui vient remettre au pas un Strauss pas encore soumis aux ordres de Hitler.

Les compositions des autres comédiens sont en osmose avec les rôles principaux : discrétion et don de soi de l’épouse de Zweig, raideur glaciale et menaçante de l’officier allemand.

La scène finale est bouleversante, à tel point que j’ai eu l’impression de ne plus être au théâtre, mais d’assister à la réalité des événements.

Je suis sortie de ce spectacle sonnée et reconnaissante.


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